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    Ermitage de saint-Joseph (2ème partie)

     

     

                Après avoir tenté d’évoquer sommairement l’histoire de l’ermitage saint-Joseph en prenant comme fil conducteur le texte publié en 1927 par Louis Bossu, voici, d’une manière plus anecdotique ce qu’on peut dire de l’autel et de la cloche de la chapelle dudit ermitage et, -dans un prochain et dernier article- de frère Hilarion, l’un des derniers ermites d’Harréville.

     

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    1) L’autel de la chapelle de l’ermitage a été, au cours du XIXème siècle transporté dans l’église. Il est situé à gauche de l’entrée et comporte trois statues, dont celle de st-Joseph au centre. L’autel est peint en bleu, symbolisant le ciel, avec un bandeau bleu-foncé comportant l’inscription « Ite ad Joseph » (Allez vers Joseph).  St-Joseph est le saint protecteur qui a donné son nom à l’ermitage. Il faut resituer le choix de ce nom dans son contexte historique à l’époque de la création de l’édifice. En effet, « c’est au milieu du XVIIème siècle que la piété à l’égard de st-Joseph prit son essor. Louis XIV lui consacra la France le 17 mars 1661 et l’empereur Léopold 1er fit de même en 1678. Egalement l’Espagne et les Pays-Bas en 1679. Le Canada où son culte s’est implanté à la même époque lui a consacré un grandiose sanctuaire. St-Joseph a été proclamé patron de l’Eglise universelle en 1863, et, comme travailleur manuel dans le bâtiment, patron du monde ouvrier. Fête le 19 mars. » (Missi n° 438 avril-mai 1981, p. 140 ).

              L’ermitage dont la création remonte au dernier quart du XVIIème siècle (voir article précédent) a donc vraisemblablement suivi un effet de mode pour le choix du saint protecteur.

     

              Dans la partie inférieure de l’autel on a représenté la croix de Malte ou croix de st-Jean, symbole des Hospitaliers de l’ordre de st-Jean de Jérusalem. Les chevaliers de Malte étaient des religieux liés par les trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. L’ordre adopta la croix blanche à huit pointes. On peut se demander pourquoi celle de l’autel est bicolore (rouge et bleu).

     

              Au bas de l’autel, de chaque côté, il y a deux cubes en bois (sans doute des stèles destinées à porter une statue ou un ornement religieux) peints l’un avec la lune, l’autre le soleil, symboles de la nuit et du jour (eau / feu, femme / homme). On ne sait de quand datent ces ornements ni s’ils ont été faits dans un but symbolique et efficient ou simplement décoratif.

     

              Une interrogation subsiste quant à la date et aux circonstances de la descente dudit autel depuis l’ermitage jusqu’à l’église. Louis Bossu écrit ceci : Vers 1850, la chapelle fut désaffectée : l’autel dédié à st-Joseph et la statue du saint ont été transportés à l’église d’Harréville, rachetés par la fabrique et y ornent encore une des nefs latérales de l’église. Cependant les registres communaux du milieu du XIXème siècle ne relatent rien.

     

              Camille Lomon p. 183 indique : 1833, installation, dans la chapelle des fonds baptismaux, de l’autel provenant de la chapelle de l’ancien ermitage de st-Joseph.

     

              Aucun document parmi ceux que j’ai pu consulter ne l’atteste. 17 années séparent les périodes évoquées par les deux auteurs ci-dessus. Le seul document que l’on peut qualifier de fiable est celui trouvé dans un rapport du conseil de fabrique du 19 avril 1846 (p. 36) : ... Mr. Nicolas Lironcourt susdit ancien trésorier a recouvré et reçu 1er de Mr. Jean Beurlot 30 francs le 4 juin 1826, 2ème de Mr Nicolas Beurlot 48 francs dont ledit Lironcourt a donné quittance aux payeurs ; ces deux sommes ont été employées pour payer un autel et trois statues venant de l’ancienne chappelle de st-Joseph, au finage d’Harréville. L’argent reçu en 1826 (78 francs) n’était plus dans la caisse en 1846. Entre temps on a payé (au propriétaire des lieux) l’autel et trois statues.

     

     

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    2) La cloche de la chapelle. C’est une petite cloche de 27 kilos environ, installée dans l’église d’Harréville, au-dessus de l’autel st-Joseph. Elle a gardé sa belle tonalité cristalline que les villageois pouvaient entendre aux XVIIème et XVIIIème siècles. Le rapport du conseil de fabrique ci-dessus contient les renseignements suivants : On peut encore ajouter ici que la cloche de ladite chapelle n’a jamais été vendue, qu’elle était déposée au clocher de l’église d’Harréville et qu’elle a été transportée sur la maison d’école des filles pour les appeler en classe comme on l’y voit actuellement.

     

              Camille Lomon p. 211, plus précis reprend la date 1833 (on ne sait d’où) : La cloche de l’ermitage, d’abord laissée sur place pour un motif non connu, fut sauvée de cet abandon par les garçons d’Harréville. Ils allèrent l’enlever, de nuit, pour la confier ensuite à la municipalité, qui la fit placer dans un petit clocheton construit sur le toit de l’école des filles, sise alors rue cour Lorrier. On peut voir aux pages 182 et 211 de son ouvrage des photos de la cloche. Le 7 septembre 1935 elle fut fixée à l’emplacement qu’elle occupe toujours actuellement.

     

              Comme toute cloche, elle fut baptisée et porte un nom dont la trace indélébile a été fondue avec le métal : JE MAPELLE MARGUERITE & IAY POUR PARRAIN JOSEPH BOURGON & POUR MARRAINE MARGUERITE AGNES COCHET DE SAINTRES 1691 V ADAM MA FAICTE.

     

              Le parrain Joseph Bourgon était en 1691 admodiateur* et receveur de la terre et seigneurie d’Harréville pour le prieuré.

     

    * Admodiateur : celui qui donne une terre à ferme, le loyer étant généralement payé en céréales.

     

              La marraine Marguerite Agnès Cochet née à Pompierre en 1670 avait 21 ans au moment du baptême de la cloche. C’était la fille de Jacques Cochet seigneur de Ceintrey (Meurthe-et-Moselle) transcrit SAINTRES sur la cloche. Marguerite Agnès épousa le 2 mars 1699, à l’église d’Harréville messire Charles Henry de Thumery, écuyer, seigneur de Villacourt (Meurthe-et-Mosell) et du fief de Soulaucourt. Voir le document ci-dessous et sa transcription. On remarquera au passage que la mariée Marguerite Agnès Cochet alors âgée de 29 ans avait une écriture très hésitante.

     

     

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    Transcription :

     

    Ce jourdhuy deux mars mil six cent nonante neuf e

    Presence des temoings soussignés le Sre Charles henry de Thumery

    Escuyer Sg^ de vilarout de la paroisse de grafigny d’une part

    Et Damoiselle margueritte de Seintrey de cette paroisse

    D’autre part ont receu par moy sousigné la benediction

    Nuptialle ces an et jour cy dessus Cl Bichart curé d’hareville

     

    Ch de Thumery  M a cochet de ceien ey

    L de Thumery   B de Thumery

    Hu B.. (Hubert ?) de Brogonnas   h Rouyer

     

             

              Louis Bossu ignorait tout du fondeur Adam. C’est l’abbé Salmon, ancien curé de Breuvannes qui a donné la réponse dans un article : Les cloches du Bassigny paru dans le Cahier Haut-marnais n° 151 de 1982 p. 198. Les Adam étaient du village de Pompierre [...] Le mariage d’une de leurs filles, Anne, les avait unis aux Bollée, fondeurs de cloches de Breuvannes et les avait, en outre, mis en relation avec plusieurs autres fondeurs du Bassigny, tels qu’Alexis Jolly et Nicolas Cochois de Champigneulles...

     

     

     

     

     

    Bibliographie :

     

    - Bossu Louis, L’Hermitage (sic) de st-Joseph à Harréville, Paris Auguste Picard. Edition 1927. AD 52 32 Rev 22.

     

    - Lomon Camille, Harréville-les-Chanteurs et le prieuré de Saint-Calixte – Poussières du passé. Imprimerie Christmann, Essey-lès-Nancy 54 270, 2° trimestre 2001.

     

    - Revue Missi, n° 438, avril – mai 1981.

     

    - Cahier Haut-Marnais n° 151 de 1982

     

    - AD 52, Etat civil Harréville-les-Chanteurs

     

     

                                                                   Marcel Frantz


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