• ERMITAGE DE SAINT JOSEPH (3ème PARTIE)

     

    Ermitage Saint-Joseph (3)

     

                Voici le troisième article consacré à l’ermitage saint-Joseph. Il concerne l’un des derniers ermites ayant vécu dans l’ermitage : frère Hilarion. On sait que les moines changent leur identité en entrant dans les ordres. Ils prennent un nom de saint. Hilarion était un disciple de saint-Antoine, abbé en Palestine au IIIème siècle. <lat. Hilario < Hilarius, dérivé de ‘hilaris’, joyeux. Il nous reste le nom ‘hilarité’ et les adjectifs ‘hilare’, ‘hilarant’. Le nom Hilarion n’a pas été choisi au hasard puisque l’ermitage de saint-Joseph appartenait à la congrégation de saint-Antoine

     

              Qui était ce frère Hilarion ? Pour Louis Bossu, repris par Camille Lomon, il s’agit d’un certain Prudent Antoine, né à Harréville même le 16 février 1734 et frère de Claude Antoine, dit frère Benjamin, ermite de la congrégation de saint-Antoine ; admis au noviciat le 22 janvier 1755, il avait reçu l’habit le 17 octobre suivant et avait été envoyé à l’ermitage sainte-Anne de Rouceux (près de Neufchâteau -88-), puis en 1763 à celui de saint-Joseph. Louis Bossu s’est trompé, sans doute partiellement. Prudent Antoine a effectivement été baptisé à Harréville le 16 février 1734 par le curé Lemasson. Il était le fils légitime de Claude Antoine et de Marguerite Royer sa femme, parrain Prudent Guillery, marraine Reine Gillot. Peut-être que par la suite ledit Prudent Antoine fut-il ermite à Rouceux comme le prétend Louis Bossu. Mais frère Hilarion, ermite à saint-Joseph s’appelait François Maulard et n’était pas né à Harréville. En effet, il n’apparaît pas dans les relevés généalogiques numérisés de la commune. Les deux documents ci-après apportent quelques éclaircissements sur ce personnage.

     

              Document 1 : Registre municipal de Harréville. Le 7 juin 1792, le procureur Moutenot demande aux élus de faire comparaître François Maulard, ermite de saint-Joseph et de saisir les biens de l’ermitage. Ledit Maulard réclamait une portion entière d’affouage.

    ... considérant que de tems immémoriale il n’a été délivré qu’une demi-portion d’affouage aux femmes voeuves et aux garçons (célibataires) vous (les représentants de la commune) ne vous étes point écartés de la coutume ; qu’autrefois à la vérité vous aviez accordé un affouage entier aux hermites de st Joseph parceque dans le temps ils étoient deux, et même trois, que l’année dernière ledit françois Maulard n’avoit joui que d’une demi-portion, sans reclamation et que sa portion de cette année est même exploitée [...] et comme le dit Maulard, à depuis peu quitté le costume de la congrégation des hermites de st Antoine, et qu’en cette qualité il ne peut jouir plus longtemp des biens affectés à laditte congrégation, requiert d’office que vous ayez à nommer deux commissaires qui se transporteront audit hermitage avec votre sécrétaire pour faire inventaire des meubles et effets qui pourroient appartenir à laditte congrégation ou à la Nation le cas échéant, y etablir gardien, ou en ordonner le transport en lieu sûr....

     

              Quelques détails intéressants : le texte confirme d’une part qu’il y a eu jusqu’à trois ermites à saint-Joseph et d’autre part que François Maulard avait en quelque sorte démissionné de sa fonction sans doute à cause du vent révolutionnaire qui secouait le pays. Il est fortement question de vider les lieux. Le document ne fait cependant pas la relation François Maulard = frère Hilarion.

     

              La réponse de l’intéressé a été immédiate. Elle n’a pas été consignée sur le registre municipal mais sur une feuille de papier archivée à Chaumont (AD 52, E dépôt 718). Ci-joint la photo dudit document.

              Document 2 :

     

    DSC00024

     

    DSC00025

     

    Transcription : Ce jourd’huy 7 juin 1792 je soussigné françois Maulard demeurant à la chapelle de st Joseph de la commune de haréville dèclare par cès prèsente quil se dèporte de la demande qu’il à fait par exploit d’assignation donné à la Municipalité d’opptenir un affouage entier comme un menage entier, et qu’il consent et se restrin à noptenir qu’un demi affouage comme de tous tems imémorable les voeuve et garcon fèsants mènages n’en obtenient qu’un demi dans la ditte paroisse, se soumettant au present acte a navoir qu’un demi affouge comme les dits garcon et voeuve, et par ledit françois Maulard de payer tous les frais, et affaire a cette egard en foi de quoi il à signé les ans et jour avant dits. 

                            françois molard dit frère hylarion.

     

              On remarque à la lecture de cette déposition que François Maulard n’a nullement évoqué l’abandon de la congrégation de saint-Antoine mais il n’a pas  contesté l’abandon de l’état d’ermite que le premier document a mis en évidence. En disant demeurer à la chapelle saint-Joseph, il a répondu discrètement à la demande du procureur d’y établir un gardien. Peut-être était-ce un appel du pied qui arrangeait tout le monde. On sait que la chapelle a été vidée dans la première moitié du siècle suivant (voir l’article précédent). Autre fait important : il a signé françois molard dit frère hylarion et a prouvé par là qu’il ne peut s’agir d’Antoine Prudent cité plus haut. L’emploi du verbe « dire », par son orthographe, préserve l’ambiguïté du participe passé et/ou du présent (celui qu’on a dit et/ou qu’on dit toujours frère Hylarion). On ne sait d’où venait cet homme ni ce qu’il est devenu après la tourmente révolutionnaire.

     

              Conclusion : L’histoire de l’ermitage de saint-Joseph et de ses occupants est arrivée à nous par bribes et lambeaux, comme des bulles qui viennent crever à la surface d’un étang. La présente étude n’a qu’une prétention : être une compilation, voire une petite synthèse de textes épars, connus et facilement accessibles. Une étude plus soutenue, englobant l’ermitage dans un contexte historique, géographique, politique, événementiel... reste à faire pour tenter d’obtenir une vision plus globale de la problématique. Il existe vraisemblablement des travaux universitaires sur le sujet. Je n’ai pas cherché à les consulter. Il se peut également que des documents non connus dorment encore au fond des archives départementales, voire nationales et peut-être religieuses à Bar-le-Duc, Nancy, Epinal ou ailleurs... Il est à souhaiter qu’une chercheuse ou un chercheur, intéressé par le sujet s’y attelle un jour.

     

                                           10/03/2012               Marcel Frantz

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